Ces derniers jours, Isabelle Morin & moi étions...

Ces derniers jours, Isabelle Morin & moi étions donc à Saorge, chez Laure & Philippe Bizot. Saorge est un village médiéval accroché aux parois « des terres de Provence du Comté de Nice ».
L’accès que nous avions choisi, via Menton, Sospel, se fait par la petite route de la vallée de la Roya, l'ancienne route du sel. Saorge possède un monastère, ancien couvent franciscain, aujourd’hui résidence d’écrivains, & géré par les monuments nationaux.
Notre rencontre avec le village fut presque aussi tangible qu’une poignée de main. & comme deux mains qui se serrent, un dialogue compréhensif s’instaura de suite, s’amplifiant durant ces quatre jours. C’était une certitude, telle cette rencontre à travers les âges, qui nous semble être la réalisation de quelque chose de trop vaste & de trop &étrange pour l’expliquer. Il nous restait donc à l’exprimer.

Isabelle & moi nous « perdions » vite dans les profondes ruelles de ce vertical amphithéâtre au dessus du torrent. Si vous aimez les escaliers multiples, les mystérieux passages qui vous chuchotent « explore-moi ! » du bout de leurs lèvres d’à travers les âges, vous ressentez rapidement l’essence de quelque immense dessein, au-delà de votre immédiate compréhension mais qu’un dessin va mettre à votre portée.
Le soir venu, nous en tirions des croquis, dont certains fusains. Dès le matin vers 8h30, nous étions dans les ruelles, nous perdant quelque peu dans les multiples escaliers, entendant une voix nous dire : « Allez-y, montez ! C’est public ! Prenez à droite ensuite, c’est le chemin du monastère ! ». Nous dessinions place de la république la matinée, avant que de gagner le lavoir de la Fontana Soutana l’après-midi, pour peindre Saorge depuis l’Est.

Jeudi matin, nous grimpions au monastère, pour une visite guidée. Nous retournions dans les ruelles après déjeuner, sur la voie extérieure surplombant votre toiture. Nous dessinions jusqu’au soir, pour ensuite revenir dîner sur le balcon.
Vendredi, nous passions chez la libraire, devant la mairie, une ancienne guide qui nous parlait des plantes endémiques de la région. Puis nous terminions la journée à peindre devant la petite épicerie, dans le sens de la jonction des rues montantes (vers l’église & le restaurant Lou Pountin) & descendante.

Quatre jours qui bâtissent des souvenirs, par l'imbrication contingente et indissoluble non pas de la couleur que nous savons que ce village aurait, mais de celle qu’il nous invite à ressentir. En cela, le souvenir de ces jours contredit Aragon, la vie n’étant plus un voyageur qui efface ses traces avec son manteau traîné derrière lui.

Amicalement vôtre, Philippe.